A l’occasion de son audition sur la «crise financière et bancaire» ayant frappé la Société Générale, le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, s’est évertué à détailler à la Commission des finances de l'Assemblée nationale les derniers éléments à sa disposition sur l’affaire Jérôme Kerviel. Il a notamment éclairci son rôle dans le dénouement de la crise, allant jusqu’à proposer la mise en place de systèmes anti-fraude dans les banques françaises ainsi qu’une hausse substantielle des amendes infligées par la Commission bancaire…Qu’il s’agisse des dépréciations et pertes record imputées aux subprimes, ou des dernières déconvenues secouant la SocGen, nombre de professionnels de la finance et du secteur bancaire dénoncent les carences graves de la réglementation et du contrôle des activités bancaires par les instances de régulation. L’un d’eux, et non des moindres, est en l’occurrence le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer.
«L’analyse de C. Lagarde correspond très bien à ce que j’aurais moi-même analysé»
D’emblée, Christian Noyer, les yeux papillotant et la voix quelque peu étouffée, a cru bon d’indiquer à la Commission parlementaire, son accord avec l’ensemble de l’analyse de l’affaire de fraude à la SocGen faite par la ministre de l’économie, Christine Lagarde, en particulier sur le calendrier des évènements et les propositions pour améliorer le système de contrôle.
Mais les questions fusent rapidement : pourquoi l’Etat et le président de la République n’ont-ils pas été informés plus tôt ? Comment la Commission bancaire, forte de 17 contrôles internes et externes en 2007 à la SocGen, n’a-t-elle rien décelé ? En somme, pourquoi et comment une telle situation a-t-elle pu se produire et durer de 2005 à 2008 ?
Visiblement mal à l’aise, le gouverneur de la Banque de France avance péniblement ses explications : concernant la confidentialité vis-à-vis de l’Etat, «pendant la période [ndlr : du 21 au 23 janvier], annonce-t-il, j’ai surveillé très attentivement la diffusion de l’information. D’abord, dans ma propre maison, où j’ai limité l’information à une toute petite poignée de collaborateurs, quatre personnes, dont j’avais besoin pour suivre le déroulement des opérations de débouclage». «[…] Bien entendu, précise-t-il, je me tenais prêt à en parler au gouvernement si les opérations de débouclages ne s’étaient pas déroulées comme je l’avais espéré».
D’autant que JP Morgan et Morgan Stanley, les banques sollicitées pour recapitaliser la Société Générale à hauteur de 5 milliard d’euros, furent nécessairement mises au courant plus tôt que les instances officielles, bien qu’aux dires de l’auditionné, «ce n’est pas une certitude.» Sans doute savent-elles mieux que quiconque garder un secret…
Reste à savoir comment la «fraude» a pu passer inaperçue si longtemps. Et là, la réponse ne manque pas de sel, Christian Noyer indiquant disposer de «pistes pour comprendre» mais «pas de réponses quant à savoir comment les contrôles n’ont pu fonctionner».
Et d’ajouter, par soucis de clarté, «nous ne nous l’expliquons pas. C’est invraisemblable !» Ce qui n’est, certes, «pas complètement rassurant» ainsi que l’a relevé le président de la Commission des finances, Didier Migaud.
Contrôleur contrôlé
Invraisemblable ou presque, car à considérer le fonctionnement de la Commission bancaire, de nouvelles interrogations surgissent. Cette dernière dispose tout d’abord de 550 personnes environ affectées au contrôle d’un millier d’établissements de crédits.
Or, rien qu’à la Société Générale, on dénombre pas moins de 2500 traders dont les rémunérations sont par ailleurs, très supérieures à celles de leurs contrôleurs.
Ensuite, chaque établissement bancaire doit disposer d’un système de contrôle interne. Or, question de temps et de moyens, même si la Commission bancaire réalise des enquêtes sur place, elle effectue également des contrôles… du système de contrôle interne des banques. De quoi éviter pour longtemps un problème qui aurait déjà été manqué par le contrôle interne d’une banque…
Or, rien qu’à la Société Générale, on dénombre pas moins de 2500 traders dont les rémunérations sont par ailleurs, très supérieures à celles de leurs contrôleurs.
Ensuite, chaque établissement bancaire doit disposer d’un système de contrôle interne. Or, question de temps et de moyens, même si la Commission bancaire réalise des enquêtes sur place, elle effectue également des contrôles… du système de contrôle interne des banques. De quoi éviter pour longtemps un problème qui aurait déjà été manqué par le contrôle interne d’une banque…
Sanctions plus coûteuses
Dans le sillage des propositions faites par Christine Lagarde, Christian Noyer a donc insisté sur l’exploration de trois domaines législatifs visant à renforcer les systèmes de contrôle bancaire.
A commencer par le montant maximal des amendes infligées par la commission bancaire. Surtout symboliques, ces amendes sont en effet plafonnées à 5 millions d’euros, bien loin des sommes mises en jeu par Jérôme Kerviel, de l’ordre de 50 milliards d’euros. Aussi le gouverneur de la banque de France a-t-il plaidé pour un relèvement de cette limite, en adéquation avec les coûts de régulation du secteur. Au chapitre du contrôle des comptes, Christian Noyer a proposé que la transposition de la directive européenne Bâle II en droit national soit l’occasion d’élargir le contrôle comptable à tout le contrôle interne en rendant obligatoire la mise en place de comités d’audit dans toutes les banques.
Enfin, le gouverneur de la Banque de France a prôné l’institution d’un «devoir d’alerte pour obliger les établissements de crédits à fournir des informations à l’Etat ou à la commission bancaire». L’objectif étant de faire en sorte que les rapports d’incidents remontent le plus haut possible dans la hiérarchie et que le contrôle de la fraude devienne un «système à part entière des contrôles».
Une fraude «incompréhensible» et «incroyable»
Selon Christian Noyer, la fraude survenue à la Société Générale reste «incompréhensible» voire «incroyable», mais il estime toutefois, à la décharge de la SocGen, que la chute des marchés le 21 janvier n'était pas liée au débouclage des positions de la banque, pas plus que la décision de la Fed de baisser ses taux le lendemain.
«Ma conviction, a-t-il avoué, est que ce phénomène n’a rien à voir avec la Société Générale, mais avec les rehausseurs de crédits».
Quant à savoir si la Société Générale laisserait ses traders dépasser les limites d'engagement, qu’il y est donc comme un système organisé, «mon sentiment est que non», a indiqué le gouverneur qui ajoute prudent, «mais nous verrons avec la fin de l’enquête». Rendez-vous dans 3-4 mois, sinon plus…
Nicolas Sandanassamy
«Ma conviction, a-t-il avoué, est que ce phénomène n’a rien à voir avec la Société Générale, mais avec les rehausseurs de crédits».
Quant à savoir si la Société Générale laisserait ses traders dépasser les limites d'engagement, qu’il y est donc comme un système organisé, «mon sentiment est que non», a indiqué le gouverneur qui ajoute prudent, «mais nous verrons avec la fin de l’enquête». Rendez-vous dans 3-4 mois, sinon plus…
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