Quand les auditeurs débarquent en entreprise

[ 28/01/08 Les Echos ]
Les relations sont bonnes entre entreprises et cabinets d'audit. Mais elles pourraient encore évoluer et gagner en temps, en argent et en valeur ajoutée.
Il serait dommage que l'ampleur de la fraude découverte au sein du groupe Société Générale - 5 milliards d'euros !- occulte l'importance du renforcement des procédures de contrôle interne effectué au sein des entreprises ces dernières années. Depuis les scandales Enron, WorldCom et autres Parmalat, les groupes ont considérablement fait évoluer leurs systèmes d'information.

Ils disposent de puissants logiciels intégrés et ont embauché pléthore de contrôleurs financiers (positionnés hors hiérarchie opérationnelle) pour procéder à quantité de contrôles permanents et occasionnels. Tout un dispositif qu'en ce début d'année, des équipes entières d'auditeurs externes s'apprêtent à contrôler.

En effet, chaque année, avec une régularité de métronome, ces professionnels - gros cartons de dossiers et ordinateurs sous le bras - n'ont pas leur pareil pour dérouler leurs questionnaires types et effectuer des recoupements en tous genres. Durant plusieurs semaines, ils passent au crible des écritures comptables à coups de techniques bien particulières : des sondages, des contrôles de cohérence, d'existence et de véracité de montants. Et déroulent leurs programmes de travail pour vérifier la sincérité et la régularité des comptes annuels.

« L'audit légal, c'est du relevé de compteurs », estime Jérôme Stioui, président de Directinet et directeur général d'IPT

France. « C'est obligatoire ; il faut en passer par ces missions de conformité et répondre scrupuleusement aux questions types. La première mission d'audit requiert un important investissement du directeur financier : il doit tout expliquer ; cela peut être harassant », poursuit Jérôme Stioui. « Avec le temps, fort heureusement, le processus se rôde et ça va plus vite chaque année. »

Au quotidien, loin d'être spontanées, les bonnes relations se travaillent. Car, face aux auditeurs qui tout à la fois doivent se montrer fermes pour recueillir de l'information et collaborer avec les salariés d'entreprises clientes pour obtenir des explications, le personnel interrogé ressent souvent un sentiment de gêne et de perturbation.

Plus subies que désirées, les missions d'audit légal sont bel et bien vécues comme un mal nécessaire. « A chaque fois que j'entrais dans le bureau de cette comptable d'une cinquantaine d'années, elle interrompait ses conversations téléphoniques par un : je dois te laisser, je suis avec le commissaire », se souvient un ancien auditeur. « C'est dire si nous sommes perçus comme des empêcheurs de tourner en rond. »

Face aux cabinets comptables de quartier, aux Big Four (Deloitte, Ernst & Young, KPMG, PricewaterhouseCoopers), aux cabinets français à assise internationale (Mazars, Fiducial) et aux autres regroupements de structures indépendantes (France Défi, etc.), les entreprises ont l'embarras du choix (« Les Echos » du 4 octobre 2007). Certaines se laissent séduire par une signature internationale, d'autres ne jurent que par de petites structures et toutes achètent de la confiance. « Quant aux tarifs, ils varient beaucoup, de 1 à 6 dans les grands cabinets », souligne un dirigeant.

Quant aux conséquences du renforcement des systèmes de contrôle interne au sein des groupes, il pourrait à terme changer la nature des travaux des auditeurs externes. « Face à un système de gestion interne très renforcé et dont la fiabilité serait vérifiée, les auditeurs pourraient être amenés à faire des contrôles moins pointillistes et à se transformer en supercontrôleurs des vérificateurs internes », poursuit François Meunier. Et tout le monde y gagnerait : les entreprises économiseraient du temps et de l'argent et les auditeurs externes verraient leurs tâches revalorisées, car plus transversales et davantage à valeur ajoutée. Les réflexions demeurent en cours.
MURIEL JASOR


Cet article provient du site : http://www.lesechos.fr/


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